sagesse
Paroles et Sagesse du Sage
Les poupées savantes
Le moine Hôtan allait souvent écouter un vieux philosophe qui donnait son enseignement dans une grange.
Au début, l assistance était nombreuse mais petit à petit elle se clairsema jusqu'au jour où Hôtan se retrouva tout seul. Le philosophe refusa alors de faire cours pour une seule personne. Hôtan promit de revenir le jour suivant avec beaucoup de monde.
Le lendemain, il disposa dans la salle de plein de petites poupées sur les bancs et s'assit au premier rang. Le maître arrive et, interloqué, dit :
- « Mais ce ne sonts que des poupées ! »
- « En effet, » dit Hôtan. « Mais tout ceux qui sont venus vous écouter ne valaient pas plus que ces petites poupées. Ils meublaient le décor sans rien comprendre à votre enseignement puisqu'ils sont partis pour ne plus revenir. Tandis que moi je suis resté vous écouter ! »
Le philosophe comprit la leçon et continua à dispenser son enseignement au jeune homme assidu.
Source : Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner
Paroles et Sagesse du Sage
Les textes invisibles
Paroles et Sagesse du Sage
Le coq de combat
Aujourd'hui encore en Asie on aime beaucoup les combats de coqs. On raconte qu'un prince était jadis tellement féru de ces joutes qu'il voulut avoir le meilleur coq : il acheta ce champion très cher et voulut lui donner une éducation supplémentaire. Il eut donc l'idée farfelue de demander à son instructeur zen de le former. Curieusement , celui-ci accepta et emmena le coq.
La veille d'une joute importante, le prince lui demanda son coq.
- Non , lui répondit le moine, je ne peux vous le remettre. Quand il voit un autre coq, ses plumes se hérissent, il trépigne et il devient furieux. Il ne peut combattre en étant ainsi énervé.
- Bien, dit le prince, qui revint quelques semaines plus tard demander des nouvelles de son coq.
- Il progresse, dit le moine, il est plus calme, mais lorsque les autres coqs chantent, il fait de même. il ne peut combattre en étant aussi influençable.
Un peu de temps passa encore , et le prince revint, bien décidé à emporter son coq.
- Vous me l'avez confié, lui dit le moine, et je vous le rendrai lorsqu'il sera prêt suivant mes critères : aujourd'hui il est puissant, serein et altier, mais il a encore l’œil mauvais quand il voit un autre coq. je ne peux le laisser combattre en étant aussi soumis à son caractère, la prochaine fois peut-être...
Quand le prince revint des semaines plus tard, le moine lui dit :
- Le voilà, prenez-le. toute envie se battre ou de ne pas se battre l'a quitté. Il est prêt.
Le prince, tout à fait dubitatif, mis dès le lendemain son coq dans l'arène. Mais aucun autre coq ne voulait se battre avec lui ! Décontenancé, il vint voir le moine pour lui demander des explications. Et celui-ci dit :
- Qui est le plus grand, celui qui se vainc lui-même ou celui qui gagne une bataille ? Le coq a appris à maîtriser ses instincts, ses tensions et sa nature profonde. Dans l'arène, personne n'ose venir l'attaquer. Il est donc le champion des champions. Il n'a plus besoin de se battre pour gagner....
Le prince comprit la leçon donnée par le vieux moine et décida de persévérer dans la connaissance de soi et la quête de l'harmonie intérieure.
Source: Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner.
Paroles et Sagesse du Sage
Le don au voleur
Durant l'ère Meiji au XIX vivait un très fameux moine, Maître Kôjun Shichiri. Un voleur s'introduisit dans son temple et vint le menacer :
- Donnez-moi de l'argent !
- De l'argent ? J'en ai.
Il lui apporta un sac plein de billets et dit :
- Aujourd'hui, on m'a donné justement beaucoup d'argent. Emportez-le, je vous prie.
Le voleur était abasourdi.
- Je peux tout emporter ? Vraiment?
- Bien sûr, vous devez tout emporter.
Le voleur très impressionné, s'apprêtait à filer lorsque Kôjun lui dit :
- Attendez ! Attendez ! votre vêtement n'est pas très épais et la nuit froide. J'ai justement reçu hier un très bon vêtement bien chaud, je vous en fais don.
Le voleur l'enfila, l'air toujours ahuri, et prit le chemin de la porte.
- Attendez un moment ,cria kôjun.
- Quoi ? Que voulez-vous me donner encore ?
- Je n'ai plus rien à vous donner ; mais ayant reçu toutes ces choses de moi, vous devez me remercier !
Le voleur le remercia.
Après quelques temps, le voleur fut arrêté et avoua ses vols. Kôjun fut convoqué et confronté au voleur. Mais il dit :
- Je ne connais pas de voleur qui soit entré dans mon temple.
- Vous ne connaissez pas cet homme ?
- Mais si. Un jour, cet homme est venu dans mon temple. Je lui ai fait des présents et il m'a remercié avant de partir.
A ce moment-là, le voleur fut encore très impressionné et, spontanément, il remercia Kôjun. Il pleura, fut très profondément ému et troublé. Ce fut pour lui une grande révolution intérieure qui lui fit changer de vie à sa sortie de prison.
Source: Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner.
Paroles et Sagesse du Sage
Un disciple demande à un maître
-« A quoi peut-on comparer la méditation ? »
- « A une montagne », répond le maître.
- « Je ne comprends pas », dit le disciple.
- « En méditation, vous êtes immobile comme une montagne. Toutes les pensées qui s'agitent dans votre esprit sont les nuages qui recouvrent la montagne. Mais le vent de votre respiration attentive chasse peu à peu ces nuages et le ciel bleu réapparaît. puis les nuages reviennent et le vent les chasse à nouveau et la montagne resplendit dans le ciel. C'est simplement cela la méditation. »
Source: Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner.
Paroles et Sagesse du Sage
Qu'est ce qui existe ?
Un jeune étudiant du zen, assez imbu de lui-même, allait d'un maître à l'autre pour les questionner.
Un jour il rendit visite à un moine Ermite, célèbre pour son laconisme et son flegme, et lui dit :
- « Tout es appelé à disparaître, tout change et se transforme, nous sommes différents de seconde en seconde, je considère donc que rien n'existe vraiment. Qu'en pensez-vous ? »
Le moine fumait une grosse pipe à long tuyau en bambou : il continua tranquillement, sans dire un mot, à tirer sur sa bouffarde de longues minutes durant.
Et soudain, il en asséna un grand coup sur la tête de son visiteur, qui hurla de douleur et de colère.
- « Si rien n'existe, d'où vient ta douleur, d'où vient ta colère ? » lui dit alors le moine.
Le jeune homme comprit et s'inclina en silence.
Source : Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner
Paroles et Sagesse du Sage "Anciens ou moderne" #parti2zero #sagesse
Anciens ou moderne
Deux maîtres employés des méthodes très différentes pour instruire leurs élèves.
L'un, très sévère et digne, voulait que les usages anciens soient respectés à la lettre ; il aimait les rituels compliqués, les longues cérémonies où, devant les autels couverts de Bouddhas dorés, l'on chantait à tue-tête des sutras et autres textes sacrés de la tradition bouddhiste après s'être prosternés maintes et maintes fois front contre terre. Il fallait le saluer mains jointes à chaque fois qu'on le croisait et les séances de méditation qu'il dirigeait avec force étaient interminables.
Son enseignement s'appuyait sur les grands textes du passé.
L'autre avait abandonné presque tout le rituel, il entretenait des rapports cordiaux avec ses élèves, privilégiait des séances de méditations courtes : à la fin de celles-ci on ne chantait plusieurs fois de suite qu'un mantra d'une syllabe, un seul son jusqu'au bout du souffle. Sur l'autel du Dojo il n'y avait qu'un vieux Bouddha en bois (et encore, disait -il, il pourrait n'y avoir rien), un bâtonnet d'encens et une bougie.
Son enseignement s'enracinait dans des événements de la vie quotidienne et, s'il citait les maîtres du passé, c'était en une formule, une phrase.
Au demeurant, ils avaient une excellente réputation tous les deux. Mais quand parfois ils se rencontraient, ils défendaient chacun leurs méthodes, l'un son formalisme rigide et sa dureté formatrice presque militaire, l'autre son apprentissage doux et graduel, privilégiant le dialogue et la simplicité.
Pour départager leurs points de vue, ils décidèrent d'aller un jour rendre visite à un très vieux moine, réputé pour sa sagesse et son bon sens, qui s'était retiré dans les bois, dans une cabane de branchages, en haut de la montagne.
Le vieil ermite tout ridé aux yeux rieurs les écouta présenter leurs méthodes et après un court silence leur dit :
« - Vous êtes tous deux sincères, alors faites ce que vous voulez : la couleur des pins n'est ni ancienne ni moderne ! »
Jolie façon efficace de dire que l'enseignement efficace dépasse les méthodes et les discours : il faut juste simplement qu'il sonne juste.
Sources: Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner
Paroles et Sagesse du Sage
Un vieux moine avait pris sa retraite.
il aimait travailler au potager du temple, mais devenait de plus en plus fatigué et courbé par les ans et les rhumatismes.
Voyant cela, deux jeunes moines, émus par son grand âge, se dirent :
- « Nous allons cacher ses outils et ainsi il sera obligé de se reposer »
Ne trouvant plus ses outils, le vieux moine se coucha et refusa toute nourriture.
Au bout du troisième jour, inquiets, les moines lui ramenèrent ses outils.
Avec un large sourire sans dents, le vieillard se leva, mangea un bol de riz au soja, reprit ses outils et marmonna en leur faisant un clin d’œil :
- « Pas de travail, pas de nourriture. »
Les novices n'oublièrent pas la leçon du vieux moine courageux.
Sources: Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner
Paroles et Sagesse du Sage
L'attention
Une histoire zen raconte qu'on demanda à un maître quel était l'enseignement le plus profond du zen.
Il écrivit au tableau le mot « attention »
- N y a t-il pas autre chose ? lui demanda l'élève.
- Si, répondit-il, il y a autre chose.
Et il écrivit à nouveau le mot « attenrion »
- Mais il doit bien y avoir autre chose, insista l'élève.
- Oui, il y a autre chose, répondit le maître.
Il se tourna vers le tableau et, une fois de plus, il écrivit le mot « attention ».
À présent, on pouvait lire sur le tableau « attention, attention, attention »
L'attention au corps, l'attention à l'esprit et l'attention à la respiration, trois sortes de présence à soi, sont nécessaires pour, à la fois, bien méditer et exister pleinement. Comment nous tenons-nous, sommes-nous perdus, noyés, dans nos pensées, avons-nous conscience de respirer ?
Cette question là, on peut, sans cesse, se la poser.
Paroles et Sagesse du Sage
Cette histoire fut racontée par maître Ikkyu, qui vécut il y a quelques siècles. Alors qu'ils étaient, avec son frère cadet, jeunes moines dans un monastère, ce dernier fit tomber, en faisant le ménage, un bol en céramique très précieux, cadeau de l'empereur au supérieur du temple. Voyant son frère sangloter devant les milles morceaux du bol et craindre la colère du maître, Ikkyu lui dit de ne pas s'inquiéter. il ramassa les morceaux et les mis dans la vaste manche de sa tunique de moine. Puis il se rendit dans le jardin pour attendre le retour du maître.
Dès qu'il l'aperçut, il alla à sa rencontre et lui demanda s'il pouvait lui poser trois questions.
Celui-ci acquiesça.
- Maître, n'est-il pas vrai que tous les êtres nés en ce monde doivent mourir ?
- Bien sûr , dit le maître, hommes, insectes, animaux, poissons, oiseaux...Tout le monde meurt.... Même le Bouddha est mort.
- Certes, dit ikkyu, mais les plantes, les minéraux, les objets.... Doivent-ils aussi mourir ?
- Tout meurt, tout change, tout se transforme, répondit le maître : la fleur fane, le bois devient cendre, le rocher se change en sable, toute forme est appelée a disparaître un jour.
- Je comprends, dit Ikkyu. En somme, comme tout est périssable, on ne devrait pas avoir à regretter ni à pleurer ce qui n'est plus, ni à se fâcher contre la destinée ?
- Non, bien sûr. Mais où donc veux-tu en venir? questionna le maître.
Ikkyu sortit de sa manche les débris du bol devant le maître, qui en resta bouche bée avant d'éclater de rire.
Evidemment, si l'on casse quelque objet d'un proche, il n'aura peut être pas l'humour du maître zen. Mais on peut toujours essayer de lui poser les questions malicieuses de Ikkyu.
Sources: Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner
Paroles et sagesse du Sage
Petit bambou, grand bambou
Un moine demande au maître :
- « Quelle est la signification du bouddhisme»
Le maître répond :
- « Je te le dirai quand il n'y aura plus personne alentour »
Quelque temps plus tard, le moine revient voir le maître et lui dit :
- « Il n'y a plus personne, pouvez-vous me répondre ?»
Le maître l'entraîne dans le jardin jusqu'à la bambouseraie. Mais il ne dit rien.
Le moine, ne comprenant rien, insiste.
Alors le maître lui montre deux bambous et dit :
- « Regarde ce bambou-ci, il est tout petit. Et celui-là, il est si grand ! »
Le moine comprend que le but de sa quête est de grandir intérieurement.
Sources : Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner
Paroles et Sagesse du Sage
La loi du Bouddha
Un moine commente à un poète la Loi du Bouddha :
« Ne pas commettre le mal, faire le bien. »
Le poète n est pas satisfait :
« Même un enfant de huit ans sait cela.»
Le moine rectifie :
« Même un vieillard de quatre-vingts n'est capable de le mettre en pratique »
Sources: Sagesses et malices du zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner
Paroles et Sagesse du Sage
Le rat et les chats
Au Japon, il y a deux cents ans, Shoken, un maître du sabre (le kendo), était tourmenté par un rat dans sa maison. Toutes les nuits un gros rat allait et venait et l'empêchait de dormir. Il en parla alors à un ami qui élevait des chats.
Shoken lui demanda :
- Prête moi donc le plus fort de tes chats.
L'autre lui prêta un chat de gouttière très rapide et habile à attraper les rats ; ses griffes étaient fortes et ses bonds puissants !
Mais quand le rat entra dans la pièce, le chat s'enfuit. Shoken emprunta alors un deuxième chat, de couleur fauve, doté d'un très fort ki, une forte énergie, et d'un esprit combatif . Mais le rat eut le dessus et le chat, blessé, s'échappa !
Un troisième chat fut essayé , un chat blanc et noir qui ne put vaincre non plus. Shoken emprunta alors un quatrième chat, noir, vieux, assez intelligent, mais moins fort que les autres chats. Il entra dans la pièce. Le rat le regarda et s'approcha. Le chat s'assit, très calme, ne bougea pas. Alors le rat commença à douter. Il s'approcha encore, légèrement apeuré, et soudain le chat lui attrapa le cou, le tua et l'emporta hors de la place.
Alors, Shoken vint consulter son ami et lui dit :
- J'ai souvent poursuivi en vain ce rat avec mon sabre en bois. Pourquoi ce chat noir a t-il pu le vaincre ?
Son ami lui répondit :
- Il faut organiser une réunion et interroger les chats. Tu les questionneras puisque tu es un maître de kendo. Les chats comprennent sûrement les arts martiaux.
Il y eut donc une assemblée de chats présidée par le chat noir qui était le plus âgé.
Le chat de gouttière dit :
- J'étais très fort.
Alors le chat noir lui demanda :
- Pourquoi n'a tu pas gagné ?
Le chat de gouttière répondit :
- Je possède beaucoup de techniques pour attraper les rats. Mes griffes sont fortes et mes bonds puissants, mais ce rat n'est pas comme les autres.
Le chat noir déclara :
- Ta force et ta technique étaient donc insuffisantes.
Alors le chat tigré parla :
- Je suis très puissant, j'entraîne toujours mon ki, mon énergie, et ma respiration par le zazen. Mais je n'ai pas pu vaincre ce rat. Pourquoi?
Le vieux chat noir lui répondit :
- Ton activité et ton ki sont forts, mais ce rat était au-delà de ton énergie. Si tu es attaché à ton énergie, celle-ci devient une force vide. Si elle est trop soudaine, trop brève, tu n'es alors que passionné. C'est pourquoi la force du rat était supérieure à la tienne.
Puis ce fut autour du chat blanc et noir qui n'avait pas pu vaincre non plus. Il n'était pas très fort, mais intelligent et habile. Mais il n'était pas mushotoku (sans but ni esprit de profit) et avait dû fuir lui aussi. Le chat noir lui dit :
- Tu es très malin. Mais tu n'as pas pu vaincre ce rat car tu avais un but. Et l'intuition du rat était plus grande que la tienne. Quand tu es entré dans la pièce, il a tout de suite compris ton état d'esprit et où tu voulais en venir. C'est la raison pour laquelle tu n'as pu triompher. Tu n'as pas su harmoniser ta force, ta technique, et ta conscience active, qui sont restées séparées au lieu de s'unifier. Tandis que moi, en un seul instant, j'ai utilisé ces trois facultés inconsciemment, naturellement et automatiquement. C'est ainsi que j'ai pu tuer le rat. Mais, près d'ici, dans un village voisin, je connais un chat encore plus fort que moi . Il est très vieux et ses poils son gris.
Je l'ai rencontré, il n'a pas l'air fort du tout ! Il dort toute la journée. Il ne mange pas du tout de viande, ni de poisson, seulement de la guenmai (soupe de riz). Il n' a jamais attrapé un seul rat, car tous ont peur et fuit devant lui. Ils ne s'en approchent pas. Aussi n'a t'il jamais eu l'occasion d'en attraper un !
Un jour, il est entré dans une maison qui en était pleine. Tous les rats se sont aussitôt échappés et ont changé de maison. Il pouvait les chasser même en dormant. Ce chat gris est vraiment très mystérieux. Tu dois devenir comme cela, être au-delà de la posture, de la respiration et de la conscience.
Grande leçon pour Shoken, le maître du kendo !
Source : Sagesses et malices du Zen de Marc de Smedt et Jochen Gerner